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Le banc de l’église
Il était une fois, dans le paisible village de Saint-Apollinaire, une petite fille aux yeux curieux, venue s’asseoir sur un vieux banc d’église, serrée contre sa famille. Elle ne comprenait ni les paraboles du prêtre, ni les grands principes de la foi. Il y avait des chants et cela ressemblait à des comptines. Aussi, de longues histoires étaient lus, mais la jeune fille ne comprenait pas toujours tout… Ce qu’elle comprenait, pourtant, c’était la chaleur d’une main dans la sienne, celle de sa maman, parfois celle de sa sœur ou de ses grands-parents. Elle était habituée d’entendre le froissement des vêtements du dimanche. Ce qu’elle aimait par-dessus tout, c’était d’allumer des lampions et de sentir l’odeur rassurante du bois vieilli et de l’encens.
Avec les années, la vie l’a fait s’asseoir sur d’autres bancs. Des bancs plus silencieux, empreints de tristesse, pour dire adieu à ses grands-parents, à ses oncles, à ses tantes… et, une fois adulte, à sa douce maman. Une femme de cœur, toujours présente dans l’ombre, offrant son temps pour que cette église vive encore, pour que ses murs respirent l’amour, même quand les bancs commençaient à se vider. La jeune fille devenue grande le voyait bien elle aussi que les coffres se vidaient et, même si elle voulait que les gens de son âge viennent, elle revenait moins souvent visiter son banc familial en raison de ses obligations…La culture change avec les années…
Ce qui devait arriver arriva… Eh oui, parfois, les bâtisses à la belle structure, fondatrices des villages ont un destin différent de celui qu’on espérait pour elles.
Aujourd’hui, cette église se transformera. Heureusement, elle ne sera pas abandonnée. Notre belle église aura un deuxième souffle.
Elle n’abritera plus les chants du dimanche ni les prières murmurées. Elle deviendra un centre de culture. Et si le culte change, les souvenirs, eux, restent. Ils restent dans chacun de nous. Bien que le pincement au cœur soit vif et présent, il faut continuer à avancer dans l’avenir.
Sur ces bancs, cette même petite fille, devenue grande, a vécu aussi des moments de lumière : des mariages, des baptêmes, un bal de finissants. Des larmes, oui, mais aussi des rires. Des adieux, mais surtout beaucoup d’amour. Chaque banc porte l’empreinte d’une histoire, d’un cœur qui a battu un peu plus fort à cet endroit précis.
Aujourd’hui, je ne vous demande pas d’avoir la foi. Je vous invite simplement à revenir une dernière fois. Pas pour prier, si cela ne vous parle pas. Mais pour ressentir. Pour écouter le silence chargé de souvenirs. Pour allumer un lampion, en pensant à ceux qui nous ont quittés. Pour lever les yeux vers les vitraux, et y capter une dernière fois la lumière qui dansait autrefois sur nos visages d’enfants.
Revenez. Asseyez-vous une dernière fois sur ce banc. Car même si les bancs partiront, les souvenirs, eux, ne partiront jamais.
30 août à 15h00.
Karine Lepage membre du CCOL